Notice descriptive

80 J - (1890-1981)    

  • Présentation du producteur

    À partir de 1872, l’industrie textile s’installe dans la vallée de la Moyenne Moselle, où la ligne de chemin de fer relie depuis 1857 Nancy à Épinal. L’arrivée des industriels alsaciens et l’essor des marchés coloniaux contribuent au développement de la production textile des Vosges. La construction du canal de l’Est (1874-1883) permet le transport des denrées pondéreuses et fournit au canton de Charmes un atout supplémentaire.

    En 1890, l’année même où se créait à Épinal le syndicat cotonnier de l’Est, devenu peu après le syndicat textile de l’Est, une société franco-anglaise, la société cotonnière de l’Est, faisait part au maire de Portieux de son intention d’acquérir le terrain dit du Pré le Noyer. Constituée sous forme anonyme par les associés Garcin, Massard, Lings et compagnie, elle fit construire entre le canal de l’Est, la ligne de chemin de fer et la route nationale, en bordure des communes de Portieux et de Vincey (d'où la terminologie de filature de Vincey sise sur le territoire de Portieux.), une filature « à l’anglaise ». Le nouveau bâtiment fit partie d’une série d’usines à l’architecture triomphale, qui mêlait l’utilitaire aux réminiscences historiques, telles, pour les Vosges, les usines d’Habeaurupt (commune de Plainfaing), Fraize, La Gosse (Golbey), Saint-Étienne-lès-Remiremont, Les Longines (Saulxures-sur-Moselotte) ou encore Laveline-devant-Bruyères…

    La manufacture de Vincey est un vaste bâtiment rectangulaire, construit à partir d’une ossature en béton, remplie par des briques rouges à Vincey (jaunes à Fraize). Haut de quatre étages, avec un toit plat, formant réserve d’eau en cas d’incendie, le bâtiment de Vincey est flanqué de deux tours, l’une crénelée, l’autre coiffée d’une toiture tronquée à quatre pans. Les façades sont rythmées par des fenêtres géminées autrefois largement ouvertes, naguère remplies par des parpaings pour satisfaire aux normes modernes de climatisation. Ce bâtiment, connu sous le terme de Vincey I, fut équipé en 1891 de matériel d’origine anglaise, fourni par Platt, dont certains éléments restèrent jusqu’à la fermeture de 1981. Des agrandissements successifs, en particulier la construction de Vincey II, permirent de porter la capacité à 92 000 broches classiques et 3 600 broches de retords en 1929. En raison de son intérêt architectural, le bâtiment, l’un des rares survivants de la série des filatures à l’anglaise, a été inscrit à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 1991.

    Après une première série de difficultés qui contraignirent à la fermeture de l’usine, la filature est louée, en octobre 1936, au Comptoir d’industrie cotonnière et entre par achat, le 1 novembre 1938, dans le groupe Boussac, qui acquit, au lendemain de la crise de 1929, une quinzaine d’établissements en Alsace et en Lorraine. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, et jusqu’en 1963, de nombreuses acquisitions renouvellent le parc de machines. D’importants travaux de climatisation sont réalisés. La filature tente alors de diversifier sa production par la fabrication de fils synthétiques. Mais depuis 1955 et l’amenuisement du marché colonial, l’industrie textile connaît des difficultés que renforce la crise du pétrole de 1974. Le transfert de matériel et les échanges de fournitures entre les différentes usines du groupe ne permirent pas de maintenir le site de Vincey qui ferma le 1 octobre 1981. Depuis lors, des sociétés diverses (matériel pédagogique, unité de stockage du commerce alimentaire, publiciste) et un musée privé de l’armement des deux guerres mondiales occupent et entretiennent les locaux industriels, empêchant le formation d’une friche, et maintiennent une activité économique locale.

  • Historique de la conservation

    Les archives de la filature étaient restées sur site, lors de la fermeture de l’usine en 1981, sauf les registres du personnel, qui ont regagné le siège central de la société Boussac-Saint frères. Après dix années d’abandon, durant lesquelles des dommages importants ont amputé ce fonds, à l’issue d’une manifestation organisée en l’honneur du centenaire de l’usine, le gérant de la société Boussac-Saint frères fit don aux Archives départementales des Vosges, sous condition que les locaux qui les contenaient, c’est-à-dire les grands bureaux et les caves, fussent débarrassés. Grâce à l’aide technique de la mairie de Vincey, le transfert des documents qui pouvaient être sauvegardés, malgré les ravages des pillards qui avaient récupéré le mobilier en jetant les archives au sol, malgré l’eau et malgré les rongeurs, fut réalisé au mois de juillet 1992. Trois tonnes de documents, dans un état de pourriture qui ne permettait aucune restauration, ont dû être détruits.

    Les épaves, représentant 75 ml, transférées aux Archives départementales des Vosges, justifiaient le traitement exceptionnel qui leur a été appliqué. Les pièces de la constitution de l’affaire, des dossiers techniques, les notes d’études de produits nouveaux et de la difficile gestion de la crise sociale des années 1970 ont pu être retrouvés. Le fonds de la filature de Vincey est le seul, quoique incomplet, de ces filatures à l’anglaise qui ait pu être conservé. Les bâtiments de Fraize, d’Habeaurupt et de Saint-Étienne ont disparu, ainsi que leurs archives. Quelques pièces ont pu être prélevées à Fraize avant le passage des démolisseurs. Il importait donc d’œuvrer rapidement pour la conservation du témoignage d’une facette importante sinon primordiale de l’industrie textile des Vosges. Il faut en rendre hommage à mes collaborateurs qui ont travaillé dans des conditions particulièrement difficiles : MM. Braux, Doyen, Léonetti, Marotel, Pierre et Vincent.

     

     

  • Mode de classement

    Les archives ont été classées selon le cadre préconisé par Bertrand Gilles pour les archives industrielles. Les deux fonds de la société cotonnière de l’Est et du comptoir de l’industrie cotonnière ont été mêlés durant l’activité de la filature et n’ont donc point été dissociés lors du tri. Le tableau synoptique des deux fonds [annexe II] permettra aux chercheurs de retrouver rapidement les documents selon leur provenance d’origine.

    Trois livres de paies de la Filature de Vincey ont été retrouvés dans le fonds communal de Portieux, déposé en 2008 aux Archives départementales des Vosges. Ces trois registres (datés entre 1941 et 1945) intègrent le fonds 80 J de la Filature de Vincey dans la partie Personnel du plan de classement sous les cotes 80 J 118* à 120*. Ils correspondent à la période locative du comptoir de l’industrie cotonnière et complètent les périodes de guerre pour la seconde guerre mondiale, jusqu’à présent lacunaire.

  • Modalités de reproductions

    Reproduction des documents soumise aux dispositions du Règlement de la salle de lecture et du Code de la propriété intellectuelle.

  • Bibliographie

    « L’avenir de l’industrie textile », , 1965 [Arch. dép. Vosges, JPL 740].

    COLLET (Vital), , Épinal, 1905 [Arch. dép. Vosges, in-8° 2553].

    DOYEN(Jean-Pierre), , Épinal, Société d’émulation des Vosges, 1983 [Arch. dép. Vosges, Br 4993].

    DOYEN (Jean-Pierre), , Épinal, Centre départemental de documentation pédagogique, 1983-1986, 2 vol. [Arch. dép. Vosges, Br 7763].

    GAIRE (abbé Léon), , 1978, 72 p. [Arch. dép. Vosges, Br 4719].

    POULL (Georges), , Rupt-sur-Moselle, chez l’auteur, 1984 [usines vosgiennes du groupe Boussac-Saint frères, p. 211-232 ; Vincey, p. 255-228].

  • Indexation
  • Mot(s) matière
    industrie textile
  • Nom(s) géographique(s)
    Portieux (Vosges, France)
  • Organisme(s)
    Filature de Vincey
  • Liens

Pour aller plus loin

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